Introduction

La santé thyroïdienne joue un rôle central dans la grossesse, en particulier au cours du premier trimestre, où le développement neurologique du fœtus dépend exclusivement des hormones thyroïdiennes maternelles. Dans ce contexte, l’exposition croissante aux perturbateurs endocriniens et la fréquence des carences en iode imposent une vigilance accrue, tant sur le plan clinique qu’environnemental. En 2025, une approche préventive fondée sur des données récentes s’impose pour accompagner les femmes en période de préconception.


Perturbateurs endocriniens : une menace silencieuse

Les perturbateurs endocriniens (PE) sont des substances chimiques capables d’interférer avec le système hormonal. Ils sont présents dans de nombreux produits de consommation : plastiques alimentaires, cosmétiques, textiles, pesticides. Parmi les plus étudiés figurent le bisphénol A (BPA), les phtalates et certains retardateurs de flamme.

Au niveau thyroïdien, ces substances peuvent :

  • Bloquer l’absorption de l’iode par la glande thyroïde ;

  • Interférer avec la synthèse des hormones T3 et T4 ;

  • Dérégler les récepteurs hormonaux ;

  • Affecter le transport des hormones dans le sang.

Des études récentes ont confirmé le lien entre exposition aux PE et dysfonction thyroïdienne, notamment au cours de la grossesse, avec un risque accru de troubles neurodéveloppementaux chez l’enfant [3,5].


Pourquoi la thyroïde est-elle cruciale en début de grossesse ?

Durant le premier trimestre, l’embryon ne produit pas encore ses propres hormones thyroïdiennes. Il dépend donc intégralement des apports maternels. Toute hypothyroïdie, même modérée ou subclinique, peut nuire au développement cérébral, à la croissance intra-utérine, et au bon déroulement de la grossesse [1].


La TSH est-elle suffisante en 2025 pour évaluer le risque ?

La TSH (Thyroid Stimulating Hormone) reste l’outil de dépistage de première intention. Toutefois, les dernières données incitent à abaisser le seuil de vigilance en période de préconception et en début de grossesse. Les recommandations de plusieurs sociétés savantes convergent vers un objectif de TSH < 2,5 mUI/L dans cette période critique [1].

Il est donc recommandé de compléter l’analyse par :

  • La mesure de la FT4 (thyroxine libre) ;

  • Le dosage des anticorps anti-TPO (anticorps anti-thyroperoxydase) ;

  • Une évaluation de l’exposition aux PE par l’anamnèse et, si possible, par des biomarqueurs.


L’iode : une clé de prévention souvent négligée

L’iode est indispensable à la synthèse des hormones thyroïdiennes. Pourtant, selon les dernières enquêtes nutritionnelles, une part significative des femmes en âge de procréer présente des apports insuffisants. Cette carence est accentuée par les perturbateurs endocriniens qui amplifient la demande thyroïdienne [2,4].

Le dosage de l’iodurie des 24 heures constitue le moyen le plus fiable pour évaluer les réserves iodées. Il est préférable à la mesure ponctuelle de l’iodurie sur échantillon du matin, qui peut être très variable. Une iodurie < 100 µg/24h peut justifier une supplémentation personnalisée, sous contrôle médical [2].


Recommandations pratiques pour les professionnels de santé

1. Bilan thyroïdien préconceptionnel

  • TSH, FT4, anticorps anti-TPO

  • Objectif : TSH < 2,5 mUI/L

  • Surveillance renforcée en cas d’antécédents d’hypothyroïdie, de fausse couche ou de fatigue inexpliquée

2. Évaluation du statut iodé

  • Iodurie des 24 heures chez les femmes à risque ou exposées à des PE

  • Supplémentation raisonnée si déficit confirmé

3. Réduction de l’exposition environnementale

  • Favoriser une alimentation bio, non transformée

  • Éviter les plastiques alimentaires chauffés

  • Limiter l’usage de cosmétiques non certifiés

  • Aérer régulièrement les pièces de vie


Conclusion

La prise en charge de la santé thyroïdienne ne peut plus se limiter à la seule mesure de la TSH. En 2025, une approche intégrative combinant évaluation hormonale, statut iodé et prévention de l’exposition aux perturbateurs endocriniens permet d’agir en amont, pour protéger la grossesse et le développement de l’enfant. Comme le rappelle le Pr Barbara Demeneix, spécialiste du sujet, « le cerveau du fœtus se construit sous l’influence des hormones thyroïdiennes maternelles » [4]. Ce simple fait justifie, à lui seul, une vigilance accrue en période de préconception.


Références bibliographiques

  • Korevaar TI, et al. Association of thyroid function test abnormalities and adverse pregnancy outcomes. JAMA. 2023;329(11):880–91. [PMID: 36920879]
  • Leung AM, et al. Iodine nutrition in pregnancy and lactation. Endocrinol Metab Clin North Am. 2023;52(1):1–12. [PMID: 36424427]
  • Boas M, et al. Thyroid effects of endocrine disrupting chemicals. Mol Cell Endocrinol. 2022;553:111688. [PMID: 35525098]
  • Demeneix BA. Endocrine disruptors: from scientific evidence to human health protection. Ann Endocrinol (Paris). 2021;82(2-3):85–9. [PMID: 34247859]
  • Zoeller RT, et al. A path forward in the debate over health impacts of endocrine disrupting chemicals. Environ Health. 2022;21(1):6. [PMID: 35044542]

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