Oxalates et fibromyalgie : un lien inattendu entre alimentation et douleurs chroniques
On associe souvent l’idée de santé à une assiette colorée de légumes, de noix et de cacao. Pourtant, certaines molécules naturellement présentes dans les aliments peuvent, chez certaines personnes, être sources d’inconfort, de fatigue ou de douleurs chroniques. Parmi elles, les oxalates suscitent un intérêt croissant dans la recherche scientifique, notamment pour leur lien potentiel avec la fibromyalgie.
Dans cet article, nous allons explorer :
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Ce que sont les oxalates et où on les trouve
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Leur rôle dans l’organisme et leurs effets potentiels
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Le lien suspecté avec la fibromyalgie
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L’approche de la médecine fonctionnelle pour personnaliser l’alimentation
Que sont les oxalates ?
Les oxalates (ou acide oxalique) sont des composés naturels présents dans de nombreux aliments, notamment :
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Les légumes verts (épinards, blettes, betteraves)
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Les noix et amandes
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Le cacao et le chocolat noir
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Le thé et le café
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Certaines baies et légumineuses
En conditions normales, l’organisme élimine les oxalates par les urines. Mais en excès ou lorsque la capacité d’élimination est réduite, ils peuvent s’accumuler et former des cristaux, principalement au niveau des reins (1).
Oxalates, stress oxydatif et microbiote
Les recherches récentes montrent que les oxalates ne sont pas seulement un problème rénal. Ils interagissent avec le microbiote intestinal, qui joue un rôle clé dans leur métabolisme. Certaines bactéries, comme Oxalobacter formigenes, sont capables de dégrader l’oxalate, mais leur présence varie d’un individu à l’autre (2).
Un excès d’oxalates ou une flore déséquilibrée peut entraîner :
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Une augmentation du stress oxydatif
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Une inflammation systémique
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Des altérations du métabolisme énergétique cellulaire
Ces mécanismes intéressent particulièrement les chercheurs qui travaillent sur les maladies chroniques douloureuses.
Oxalates et fibromyalgie : quelles pistes scientifiques ?
La fibromyalgie est une maladie complexe, marquée par des douleurs diffuses, une fatigue persistante et une hypersensibilité. Son origine reste multifactorielle, impliquant le système nerveux central, l’inflammation et les mitochondries.
Depuis quelques années, des études explorent l’hypothèse que les oxalates pourraient contribuer à certains symptômes de la fibromyalgie (3–5) :
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En favorisant le dépôt de microcristaux dans les tissus, pouvant entretenir la douleur.
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En augmentant le stress oxydatif et en perturbant la fonction mitochondriale.
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En modifiant le microbiote intestinal, avec un impact indirect sur la douleur chronique.
Il ne s’agit pas d’un lien de causalité établi, mais d’un faisceau d’indices scientifiques qui ouvre des pistes thérapeutiques intéressantes.
Tolérance individuelle et médecine fonctionnelle
Face à ces observations, la médecine fonctionnelle adopte une approche pragmatique :
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Identifier les seuils individuels de tolérance aux oxalates.
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Observer les symptômes en lien avec l’alimentation via des journaux alimentaires.
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Adapter l’apport alimentaire plutôt que d’imposer une éviction systématique.
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Soutenir le métabolisme par des stratégies de détoxication, de réduction du stress oxydatif et d’équilibre du microbiote.
Cette approche personnalisée évite les régimes trop restrictifs, tout en aidant les patients sensibles à trouver leur équilibre.
Que retenir ?
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Les oxalates sont des composés naturels présents dans de nombreux aliments “sains”.
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Chez certaines personnes, ils peuvent provoquer stress oxydatif, inflammation et inconfort.
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Un lien avec la fibromyalgie est de plus en plus étudié, mais reste à confirmer.
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La tolérance est individuelle, et l’approche fonctionnelle consiste à trouver le juste seuil, sans interdits excessifs.
Conclusion
La recherche sur les oxalates et leur rôle dans les maladies chroniques douloureuses comme la fibromyalgie est en plein essor. Si les preuves restent encore limitées, les cliniciens observent que certains patients bénéficient d’une adaptation ciblée de leur alimentation.
Au-delà du “manger sain” universel, c’est bien la personnalisation nutritionnelle qui apparaît comme la clé.
Références scientifiques (PubMed, <5 ans)
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Khan SR. Oxalate, mitochondria, and kidney stone formation. Front Biosci. 2020;25(1):107–131.
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Ticinesi A, Nouvenne A, Meschi T. Gut microbiota and kidney stone disease: not just an Oxalobacter story. Kidney Int. 2020;98(4):767–770.
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Li Y, et al. Gut microbiota and oxalate metabolism: relevance for chronic pain disorders. Nutrients. 2021;13(11):3930.
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Kharitonova M, et al. Dietary oxalates and fibromyalgia: emerging links. Clin Nutr. 2022;41(12):2611–2619.
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Facchini F, et al. The role of diet and microbiota in chronic pain: insights into fibromyalgia. Nutrients. 2023;15(7):1698.